Alors que tous les cabinets s’apprêtent à tourner la page de 2024, chez Dext, nous avons organisé le 12 décembre un débat entre professionnels sur les tendances comptables 2025. Boris Sauvage (vice-président du CNOEC), Laurie Stromboni (présidente du CJEC), Régis Samuel (DG de MyUnisoft) et Florent Dujardin (DG de Dext France) ont ainsi débattu sur trois thèmes, dont celui de la nouvelle génération d’experts-comptables, son profil et ses attentes. Cet article résume ces échanges autour de l’avenir de l’expert-comptable. Il semble plutôt radieux, à condition de s’en donner les moyens.
Le métier et les missions évoluent en profondeur, du fait des nouvelles technologies notamment. Et les jeunes experts-comptables ne se contentent pas d’y rêver. Ils changent déjà. C’est une vraie révolution et ils montrent la voie à leurs aînés.
Laurie Stromboni, présidente du CJEC, explique de façon enthousiaste les changements qui s’opèrent actuellement dans la profession. “Aujourd’hui ce qu’on voit, ce sont des jeunes experts-comptables qui créent leur cabinet avec la production comptable qui est secondaire. C’est toujours le point d’entrée, mais ce sont les nouvelles missions proposées qui sont les missions phares”.
Ces jeunes diplômés n'hésitent pas à compléter leur formation dès le diplôme DEC en poche. Ainsi, ils obtiennent des certifications complémentaires, afin d’ajouter de nouvelles missions spécialisées à l'offre de leur cabinet.
Lors de l’émission, Laurie Stromboni a exposé le projet Impulsion. C’est une démarche conjointe du CJEC et de l’ANECS. L’objectif était de produire un livrable avec des actions concrètes pour la profession. Les groupes de travail se sont réunis pendant plusieurs mois. Et, 28 propositions figurent dans le manifeste publié.
Voici les trois thématiques sur lesquelles ces jeunes professionnels de la comptabilité ont travaillé :
Vous pouvez télécharger ce manifeste sur le site du CJEC. Il est riche d’enseignements pour la construction de l’avenir des experts-comptables.
La nouvelle génération d’experts-comptables perçoit bien le besoin d'évolution dans leur comportement en tant que professionnels. Voici comment Boris Sauvage, vice-président du CNOEC le résume :
“On parle souvent du changement de posture nécessaire de l’expert-comptable. Il a une excellence technique et doit aller vers le côté chef d’entreprise qui s‘occupe de la richesse première que sont les équipes et de la partie stratégie de son cabinet, avec les missions complémentaires. Et s’ajoute la tendance de la numérisation. Je crois que le projet Impulsion est en plein là-dedans. C’est signe que les jeunes experts-comptables ou stagiaires évoluent bien dans ce sens”.
Voici un zoom sur deux souhaits importants des nouveaux experts-comptables et stagiaires, tels que les intervenants les ont exprimés le 12 décembre 2024.
Les jeunes experts-comptables recherchent plus de facilité pour travailler conjointement avec d’autres professionnels afin de maximiser l’offre de conseil. Ils évoquent les axes suivants :
Cette génération d’experts souhaite voir évoluer le cadre actuel des activités commerciales qui reste restreint. Elle désire aussi poursuivre les travaux en commun avec les commissaires aux comptes dans le cadre de commissions.
Régis Samuel témoigne de sa propre expérience antérieure d’expert-comptable. Il explique : “La marque expert-comptable est une marque de confiance. C’est pour cela qu’on s’est posé la question d’internaliser les services au sein du cabinet. Et cela ne peut se faire qu’en reposant sur de vrais experts”.
En quelque sorte, avec davantage d’interprofessionnalité, l’expert-comptable 3.0 pourrait proposer demain une offre globale d’accompagnement à l’entrepreneur. Ce serait plus de valeur, en mode guichet unique.
Il ressort des échanges entre les intervenants que le déploiement de formations de management reste une préoccupation majeure pour l’avenir de l’expert-comptable.
Ainsi, Florent Dujardin explique que “toutes les études montrent que les collaborateurs ont un mal-être par rapport au management et qui n’est pas perçu par les managers et les associés. Cela n’est pas propre aux experts-comptables, c’est dans tous les milieux. Les gens qui deviennent chefs d’entreprise sont souvent des experts techniques. Ils n'ont pas été formés au management. Or, cela ne s'invente pas”.
Cette émission disponible en replay a aussi généré des échanges nourris sur l’image de la profession. Serpent de mer s’il en est, l’attractivité des métiers en berne et l'image vieillissante ne font pas l’unanimité parmi nos intervenants.
Le sondage réalisé récemment sur LinkedIn montre que le principal blocage pour recruter reste pour 48 % l’image vieillissante de la profession.
Laurie Stromboni explique que le métier au quotidien demeure mal compris du grand public. Elle estime qu’une des raisons vient du mode managérial pratiqué. Elle relève que les formations proposées par les IRF en la matière sont souvent annulées, faute d’inscrits. Elle ajoute que le besoin de sens et la compréhension de la stratégie du cabinet contribuent aussi à l’image positive. Enfin, selon Laurie, l’attractivité de talents dépend également des outils dont dispose le cabinet.
Sur ce dernier point, Florent Dujardin lance un trait d’humour :
“les candidats qui choisissent en fonction des logiciels présents dans le cabinet, ça c’est mon rêve en tant qu’éditeur de Dext. Notre objectif c’est que ceci soit un gros plus à chaque entretien d’embauche en cabinet”.
Mais, ne serait-ce qu’un cliché ou une image d’Épinal qui aurait la vie dure finalement ? Boris Sauvage a tenu à modérer cette perception poussiéreuse de l'expert-comptable. Il s’exclame : “parfois, on se flagelle un peu par rapport à l’image. On est passé de 140 000 à 170 000 personnes au sein de la profession sur 3 à 5 ans. Résultat du DSCG ? Ce sont 1 000 diplômés de plus. On note aussi au niveau des vœux de Parcours Sup, une progression du choix de la filière comptable”.
Le besoin ne se situe plus sur de la formation dans les technologies. Avec l’IAG, elles deviennent très accessibles, ne serait-ce qu’en interrogeant un chatbot. En revanche, l’aspect soft skills et la relation commerciale et humaine sont primordiaux.
“L’expert-comptable a au départ un métier technique. Mais, ce n’est plus le sujet en 2025”, lance Florent Dujardin.
Pourtant, comme le souligne Laurie, l’expert-comptable reste intrinsèquement quelqu’un qui a soif de technique et cela ne changera pas. Toutefois, il peut apprendre à se former sur d’autres techniques. Régis Samuel ajoute que “cette confiance que le client a dans son expert-comptable repose en grande partie sur la technique. Et elle ne doit pas se perdre”.
Sans adaptation et renforcement des compétences, l’avenir de l’expert-comptable semble compliqué. Le changement de posture vers l'attitude de l'entrepreneur ainsi que l’appréhension des nouvelles missions impliquent de se former toujours plus et mieux.
Pour répondre à la fois aux attentes des nouveaux experts-comptables, à celles des clients et aux nouveautés technologiques, les compétences vont devoir évoluer vraiment. Un triptyque se dégage des échanges :
Florent Dujardin souligne une évolution significative du rôle et de la posture du professionnel : “les experts-comptables étaient jusqu’à présent en réaction à la demande. Le client arrive avec sa demande et on y répond. Or, c’est quand même possible aujourd’hui d’avoir un marketing de l’offre.” Il s’agit ici d’avoir une attitude proactive pour proposer les services adaptés à certaines entreprises. L'objectif est aussi d’attirer ou de trouver de nouveaux clients qui correspondent à l’offre de missions du cabinet.
L’Ordre des experts-comptables apporte plusieurs outils pratiques pour évoluer vers une posture d’expert-comptable 3.0.
Tout d’abord CAP 2030 aide les professionnels à réaliser l’analyse stratégique du cabinet. Boris Sauvage explique le fonctionnement de l’outil d’aide à la cartographie. Il permet de se demander : “où en suis-je aujourd’hui ? Quelles sont les missions que je veux faire demain ? Et donc aussi mesurer quels sont les impacts au niveau du cabinet”.
Par ailleurs, l’OEC propose une solution complète de GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences). Toute l’équipe du cabinet est associée à la démarche. L’objectif est d’identifier les envies de chacun, puis de mettre en phase les besoins et les ressources. Ainsi, les experts-comptables analysent de façon méthodique les compétences et talents à renforcer et les plans de formation à bâtir.
Enfin, l’OEC offre aux cabinets un troisième outil d’accompagnement : le plan de formation 2030. Il sert à construire un parcours de formation précis pour chaque collaborateur, tant sur le plan technique (le numérique notamment) que sur l'évolution de sa posture en tant que professionnel.
Cet article reprend quelques moments clés parmi les échanges très riches entre les intervenants. D’autres idées ont émergé lors des débats sur cette tendance forte de 2025, l’avenir de l’expert-comptable. Les enjeux pour votre activité de conseil et la maximisation de la valeur ajoutée dans le cabinet méritent de s’y attarder. Pour approfondir votre réflexion, visionnez le replay de cette émission ici.