La seconde émission 2025 de Dext sur les tendances comptables s’est tenue le 18 juin. Julien Catanese a animé les échanges avec Romane Bertolus, consultante senior chez Mindset Finance ainsi qu’Anthony Guez, associé fondateur du même cabinet. Ils ont débattu de la relation client en cabinet comptable, dans le cadre du plan d’action facture électronique 2026. Les débats ont porté à la fois sur la communication autour du projet facturation électronique et sur la vie d’après. Et si, finalement, ce changement fort constituait une opportunité d’améliorer cette relation client ?
Notre première émission « L’Essentiel des Tendances Comptables 2025 », en date de mars, abordait la feuille de route du cabinet pour la facture électronique. Cette fois, ce sont des membres de Mindset Finance qui ont témoigné sur la gestion de la relation client, maintenant et demain, après la mise en application de la réforme fiscale. La particularité de ce cabinet d’expertise comptable, c’est l’existence d’une activité de DAF à temps partagé significative.
Quels sont les freins à l’adoption de la facture électronique dans les entreprises ?
À cette question, les participants à l’émission ont répondu en direct :
Selon Anthony Guez, les clients TPE et les petites PME restent loin de cette préoccupation. Les différents reports de la facture électronique n’aident pas à les sensibiliser davantage. C’est au cabinet de communiquer avec pédagogie, afin de montrer ce qui changera dans leur quotidien.
Par ailleurs, selon une enquête réalisée par Dext auprès de 500 chefs d’entreprise de TPE et PME :
Les clients attendent-ils tout de leur expert-comptable en matière de facturation électronique ? Non, ils ne sont pas encore réellement demandeurs. Toutefois, la communication des autres acteurs va démarrer. Certains envoient déjà des mails aux entreprises. Repousser les échanges, c’est le risque que l’entrepreneur n’interroge pas le cabinet sur ses choix.
Or, l’important, selon Anthony Guez, consiste à les sensibiliser, afin qu’ils ne prennent aucune option seuls, notamment en matière de plateforme PDP, sans en parler d’abord avec leur expert-comptable. En effet, les cabinets doivent éviter de subir des décisions techniques de leurs clients qui leur compliqueraient la vie ou qui manqueraient de pertinence pour leur entreprise.
Anthony Guez précise qu’il a prévu d’entrer en relation sur ce sujet avec chaque client individuellement dès cet été, avant la rentrée de septembre.
Romane Bertolus explique qu’avec les modalités d’échanges habituelles, la facture électronique fait partie naturellement de la discussion, pour les missions de direction financière. Elle entretient avec les clients une relation de proximité, et communique souvent avec eux chaque semaine.
Comme nous l’expliquons dans la suite des échanges, ce rythme de communication est à adapter pour des missions d’expertise comptable. Pour des cabinets classiques, sans activité de direction financière, l’information sur la facture électronique peut s’effectuer différemment :
Tous les deux estiment que les échanges autour de la facturation électronique doivent démarrer avec chaque client, même si le cabinet n’est pas totalement prêt. Le choix des outils ne constitue pas la priorité.
D’ailleurs, comme s’exclame Anthony Guez :
« Si on attend d’être prêt à 100 %, on attend encore un an, et ce sera trop court ! »
Il souligne l’importance du palier à franchir pour les petites entreprises. Elles sont encore nombreuses à établir leurs factures sur Word ou Excel et à envoyer des PDF à leurs clients par mail.
« Cela va nécessiter de la pédagogie et un accompagnement poussé ».
Dext vous propose aussi son guide pour communiquer efficacement avec les clients sur la facture électronique.
Certains craignent la vie du cabinet avec la digitalisation et se demandent de quoi parler au client, s’il ne vient plus déposer ses pièces et factures. Nous avons posé cette question aux participants de l’émission : la réforme va-t-elle renforcer la proximité entre cabinet et client ou non ?
Romane Bertolus fait part de son expérience. Elle considère que la facture électronique représente une opportunité de revoir la relation client en profondeur. C’est un projet qui va aider à tisser un lien de confiance avec chaque entreprise, bien plus que dans les tâches classiques.
Elle le fait déjà chaque semaine avec chaque client, sans attendre une demande d’informations ou de rendez-vous. Ainsi, elle planifie du temps dans son agenda, et celui des dirigeants qu’elle accompagne en tant que DAF, pour un échange formel, périodique et sans ordre du jour précis.
« C’est le moment pour se dire les choses. Soit, on reprend les sujets traités la semaine précédente et on voit l’avancement. Soit, on relance des sujets comme la facture électronique ».
Elle explique aussi :
« En cours de semaine, on se dit, tiens, il faut que je lui parle de cela. Parfois, on déborde un peu sur le perso ou le psy. Parfois, on se connecte et cela dure seulement quelques minutes. Il y a toujours 1 000 sujets à aborder dans les petites entreprises ».
Romane Bertolus souligne que ce changement de mode de fonctionnement revient à créer le besoin, plutôt que d’attendre le dossier ou la demande client, qui peut arriver trop tard. Ce type de relation client en cabinet comptable permet aussi de dissocier le rendez-vous client du livrable.
Ce type de relation décrite par Romane dans son activité de DAF peut tout à fait s’imaginer sur les missions d’expertise comptable, avec un rythme différent. En effet, le nombre de clients en portefeuille plus important exige d’adapter la stratégie de communication.
D’ailleurs, Anthony Guez souligne que tous les dirigeants n’éprouvent pas l’envie de réaliser des points hebdomadaires. Pour lui, le besoin croît à partir d’une dizaine de salariés. En outre, ces entreprises disposent d’un budget supérieur pour de telles prestations. C’est le travail de segmentation client qui aide à proposer un tel service à ceux qui sont réellement demandeurs.
Ce type de relation client fait aussi évoluer l’expert-comptable ou le collaborateur comptable vers un rôle d’écoute ou de coach. Pour le dirigeant, souvent isolé dans son entreprise par son statut, il trouve une oreille attentive dans le cabinet. Le fait de pratiquer cette forme d’échanges facilite la détection des besoins et la proactivité. Le cabinet peut alors proposer des solutions à livrer dès le lendemain.
Comme le souligne Romane Bertolus :
« C’est le moment où le client prend l’habitude de penser à nous. Si on tisse ce lien sur le projet facture électronique, après, on le gardera et on parlera d’autre chose ».
Anthony Guez conclut cette partie de la discussion en évoquant tous les clients qui voient encore l’expert-comptable comme une pure obligation légale pour leur comptabilité. Le challenge est de les sortir de cette posture avec la facture électronique.
« Il faut qu’on arrive à leur montrer qu’on a un vrai rôle d’accompagnement ».
Cette évolution de la relation entre le client et son cabinet correspond à une profonde conduite du changement à mener. Qui sont les collaborateurs concernés ? De quelles compétences doivent-ils disposer ? Faut-il recruter pour de nouveaux services et conseils aux clients ?
Anthony Guez souligne l’aspect technique du métier à ne pas négliger, même avec l’automatisation, l’intelligence artificielle, etc. Ces compétences techniques s’apprennent avec le temps et l’accumulation d’expériences terrain variées. Personne ne peut tout maîtriser, vu le champ des possibles.
La partie savoir-être importe lors d’un recrutement. C’est ce que l’employeur peut le plus difficilement faire monter en compétence. Anthony Guez recherche particulièrement des candidats avec la capacité :
Romane ajoute la faculté de savoir s’adapter à chaque entreprise et à chaque dirigeant, ainsi que la capacité à s‘imposer quand c’est nécessaire.
Tout le monde en cabinet ne dispose pas de ces soft skills. Analysez qui peut évoluer vers ce type de relation de confiance et proactive, apporter des conseils aux clients, etc.
Cette réflexion concerne notamment l’accueil ou onboarding des clients. En effet, comme dit Anthony Guez :
« On n’a pas deux occasions de faire bonne impression. Si ça part mal avec le client, ce sera difficile de le faire revenir sur sa première impression ».
Anthony Guez explique comment il fonctionne chez Mindset Finance, déjà avant la facturation électronique. Il recrute uniquement des personnes avec une expérience de plusieurs années, et qui ont la capacité d’être très autonomes dans leur relation client.
Il participe à la première réunion client, puis apparaît rarement dans le processus au quotidien. Les clients ne réclament pas sa présence. C’est avec satisfaction qu’il constate que la relation de confiance s’est nouée avec leur interlocuteur principal. Cela démontre que les attentes des clients sont satisfaites et que le recrutement de collaborateurs est réussi.
C’était la question posée en début d’émission. Et, les échanges avec Romane et Anthony de Mindset Finance conduisent à un grand oui. Avec davantage de temps à consacrer aux clients, le collaborateur peut prendre la place à part entière de business partner. Pour les experts-comptables, c’est aussi une nouvelle posture managériale à adopter avec leurs équipes, et lors des recrutements.
Envie de vous inscrire à la prochaine émission ? RDV le 30 septembre prochain.